Appel à la perfection

 Cet extrait des paroles de Jésus vient après les Béatitudes, après qu’il ait dit : « N'allez pas croire que je sois venu abolir la Loi ou les Prophètes: je ne suis pas venu abolir, mais accomplir » et à la fin d’une série d’incitations à dépasser les exigences (minimales) de la Loi : « Il a été dit…moi, je vous dis… » Il finit par mettre la barre très haute, pour ne pas dire inaccessible : Vous donc, soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait. Dieu ne nous demandant rien qui soit hors de notre portée et la différence des natures nous empêchant de même approcher des perfections divines, cela ne saurait être de chercher à reproduire les attributs divins.  Cet appel à la perfection doit s’interpréter à la lumière de ce qui le précède immédiatement : Aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous persécutent, afin d'être vraiment les fils de votre Père qui est dans les cieux ; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes. C’est à la perfection de l’amour que Jésus nous appelle.

L’amour, la capacité d’aimer, est l’image et la ressemblance de Dieu (Gn 1, 26) que nous portons en nous, en des vases d’argile (2 Co 4, 7), dans une nature fragile, donc faillible. Pour que notre amour ressemble à celui de Dieu, il doit être universel et gratuit, s’adresser tant à ceux qui nous aiment qu’à ceux qui nous sont hostiles, à ceux qui nous le rendrons qu’à ceux qui ne nous le rendront pas.

Malgré toute notre bonne volonté, cela demeurerait hors de notre portée si Dieu lui-même ne nous prêtait assistance : « l'amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par le Saint Esprit qui nous fut donné » (Rm 5, 5). Ainsi, non seulement a-t-il inscrit l’amour dans la finalité de notre nature mais continue-t-il de nous gratifier de son amour afin que nous le répandions autour de nous. Notre amour est une réponse à la prévenance de Dieu : « Quant à nous, aimons, puisque lui nous a aimés le premier » (1 Jn 4, 19). Comme pour ce qui est d’autres dons divins, Dieu répandra l’amour dans nos cœurs à la mesure dont nous en aurons fait bénéficier, que nous aurons aimé, les autres. Plus nous aimerons, plus Dieu nous rendra capables d’aimer davantage. Les sacrements, particulièrement ceux de l’Eucharistie et de la Réconciliation, constituent une autre manière d’accueillir l’amour de Dieu. Si Dieu se donne Lui-même dans l’Eucharistie, il vient réparer, dans celui de la Réconciliation, les effets nocifs du péché qui empêchent l’Amour de s’exprimer en nous et à travers nous. Ne nous privons pas de puiser à la Source de l’amour.