Pas dans ma cour !

Pas dans ma cour !

Comme Jésus arrivait sur l'autre rive du lac, dans le pays des Gadaréniens, deux possédés sortirent du cimetière à sa rencontre ; ils étaient si méchants que personne ne pouvait passer par ce chemin. Et voilà qu'ils se mirent à crier : « Que nous veux-tu, Fils de Dieu ? Es-tu venu pour nous faire souffrir avant le moment fixé ? » Or, il y avait au loin un grand troupeau de porcs qui cherchait sa nourriture. Les démons suppliaient Jésus : « Si tu nous expulses, envoie-nous dans le troupeau de porcs. » Il leur répondit : « Allez-y. » Ils sortirent et ils s'en allèrent dans les porcs ; et voilà que, du haut de la falaise, tout le troupeau se précipita dans la mer, et les porcs moururent dans les flots. Les gardiens prirent la fuite et s'en allèrent en ville annoncer tout cela, avec l'affaire des possédés. Et voilà que toute la ville sortit à la rencontre de Jésus ; et lorsqu'ils le virent, les gens le supplièrent de partir de leur région.

Matthieu 8, 28-34

J’ai toujours trouvé bien triste cette histoire où les gens demandent au Salut, de passer outre son chemin, car ils ont peur de ce qu’il leur en coûtera de désagréments. Si tout le monde est pour la vertu, plus rares sont ceux qui sont prêts à consentir aux renoncements requis pour y parvenir. Alors que l’on s’attendrait de voir la population accourir à la bonne nouvelle qu’aujourd'hui, le salut soit venu pour cette (Lc 19, 9) région et que tous et chacun demandent à être libérés des « démons » qui les accablent pour accéder eux aussi à une vie nouvelle et jouir de la paix de Dieu, « Jésus, Fils de David, aie pitié de moi! » (Lc 18, 38), voilà que l’on supplie plutôt Jésus d’aller porter le salut à d’autres ! Nous sommes bien loin de l’attitude de Zachée (Lc 19, 1-10) qui sans que Jésus ne lui demande quoi que ce soit offre : « Eh bien! Seigneur, je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens et, si j'ai fait tort à quelqu'un, je lui rends le quadruple ».

Sommes-nous prêts à accueillir l’Amour comme Zachée et obéir aux élans de générosité qu’il nous insufflera ? Ou, inversement, nous identifions-nous aux Gadaréniens et préférons-nous demeurer dans notre zone de confort, préférant voir passer une opportunité, fut-elle unique, plutôt que de sacrifier une parcelle de ce que nous considérons être un « acquis » ?

Aujourd’hui encore nous demandons à Jésus de passer outre son chemin quand nous refusons de voir s’installer dans notre quartier une maison de transition pour ex-détenus, une maison d’accueil pour personnes affectées de troubles mentaux… « En vérité je vous le dis, dans la mesure où vous ne l'avez pas fait à l'un de ces plus petits, à moi non plus vous ne l'avez pas fait » (Mt 25, 45).