Qui perd gagne

Il n’y a pas d’amour sans don de soi, don qui implique un renoncement à soi-même, à sa liberté, à quelque chose que l’on chérit… pour le bénéfice de l’être aimé. Jusqu’où faut-il aller dans cette voie ? Les limites de l'amour c'est d'aimer sans limites (Augustin d’Hippone), jusqu’au don même de sa vie à la suite du Christ: Nul n'a plus grand amour que celui-ci: donner sa vie pour ses amis (Jn 15, 13). À Pierre qui aimerait poser quelque restriction au nombre de fois où il faut pardonner à un frère qui nous offense, avançant le chiffre 7 (7 constituant dans la Bible, faut-il le rappeler, le symbole de ce qui est complet, qui a été mené à terme, jusqu’au bout) Jésus répond : Je ne te dis pas jusqu'à sept fois, mais jusqu'à 77 fois (Mt 18, 22), c’est-à-dire infiniment, sans aucune restriction.

À donner sans restriction, ne risque-t-on pas de venir rapidement à court de ressources ? Le Dieu qui a veillé à ce que la cruche de farine de la veuve de Sarepta ne tarisse pas et que sa jarre d’huile ne désemplisse pas (pour avoir donné ce qui restait à elle et son fils pour vivre afin de nourrir le prophète Élie) et qui, en prime, a fait revenir à la vie son fils en récompense de sa bonne œuvre (1 R 17, 7-24), ce Dieu fera de même avec nous, veillant à ce que nous ne manquions de rien en ce monde (comme l’indique l’apôtre Paul dans le passage ci-après) avec en prime l’accès à une vie nouvelle, la vie éternelle au-delà de notre existence périssable :

À semer trop peu, on récolte trop peu ; à semer largement, on récolte largement. Chacun doit donner comme il a décidé dans son cœur, sans regret et sans contrainte ; car Dieu aime celui qui donne joyeusement. Et Dieu est assez puissant pour vous donner toute grâce en surabondance, afin que vous ayez en toute chose et toujours tout ce qu'il vous faut, et que vous ayez encore du superflu pour faire toute sorte de bien. L'Écriture dit en effet : L'homme qui donne aux pauvres à pleines mains demeure juste pour toujours. Dieu, qui fournit la semence au semeur et le pain pour la nourriture, vous fournira la graine ; il la multipliera, il donnera toujours plus de fruit à ce que vous accomplirez dans la justice.

(2 Co 9, 6-10).

N’hésitons pas à entrer dans le jeu de l’amour, le seul où celui qui perd est assuré de gagner plus que ce qu’il a généreusement accepté de céder !