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Méditations sur les enseignements bibliques pour le quotidien d'aujourd'hui

Amour et humilité au coeur de l'engagement chrétien

 

 

Amour et humilité au cœur de l’engagement chrétien

 

Quand ils eurent déjeuné, Jésus dit à Simon-Pierre : « Simon, fils de Jean, m'aimes-tu plus que ceux-ci ? » Il lui répond : « Oui, Seigneur, je t'aime, tu le sais. » Jésus lui dit : « Sois le berger de mes agneaux. » Il lui dit une deuxième fois : « Simon, fils de Jean, m'aimes-tu ? » Il lui répond : « Oui, Seigneur, je t'aime, tu le sais. » Jésus lui dit : « Sois le pasteur de mes brebis. » Il lui dit, pour la troisième fois : « Simon, fils de Jean, est-ce que tu m'aimes ? » Pierre fut peiné parce que, pour la troisième fois, il lui demandait : « Est-ce que tu m'aimes ? » et il répondit : « Seigneur, tu sais tout : tu sais bien que je t'aime. » Jésus lui dit : « Sois le berger de mes brebis. Amen, amen, je te le dis : quand tu étais jeune, tu mettais ta ceinture toi-même pour aller là où tu voulais ; quand tu seras vieux, tu étendras les mains, et c'est un autre qui te mettra ta ceinture, pour t'emmener là où tu ne voudrais pas aller. » Jésus disait cela pour signifier par quel genre de mort Pierre rendrait gloire à Dieu. Puis il lui dit encore : « Suis-moi. »

 

Jean 21, 15-19.

 

 

Pour avoir une juste perspective de ce dialogue entre Jésus et Pierre, il faut se référer au texte grec car la traduction française se révèle incapable rendre toute la subtilité employée par l’auteur et essentielle à sa compréhension. Pour y voir plus clair voici un extrait de la lectio divina du troisième dimanche de Pâques proposée par le magazine électronique Zenit.org, une collaboration de monseigneur Francesco Follo :

 

Après le repas où les Apôtres ont mangé le pain offert par le Ressuscité et le poisson grillé résultant de la pêche exceptionnelle, commence le dialogue entre Jésus et Pierre. Jésus lui rappelle sa trahison, sa défection. Il a suffit qu’une servante pose des questions pour que Pierre s’écroule et se ridiculise. Pour Pierre, ce souvenir est douloureux. Mais Jésus ne lui demande aucune explication, aucune excuse. Il lui demande uniquement s’il l’aime.  Que son nouveau Pontife soit fort et cohérent n’intéresse pas Jésus. Ce qui l’intéresse, c’est de savoir s’il l’aime et s’il désire encore le suivre. Celui qui sera l'Evêque de Rome, qui préside la charité, reçoit sa charge par un "examen" sur la charité. A Pierre qui lui offrait sa douleur, le Christ donne la confirmation de son amour. Le chemin de la sainteté  ne consiste pas en n’avoir jamais trahi, mais consiste en le renouvellement de notre amitié pour le Christ, chaque jour.

 

Dans le récit évangélique d’aujourd’hui, les trois questions de Jésus sont toujours différentes, parce que Jésus s’adapte aux réponses de Pierre.

 

 -  À la 1ère question : « M’aimes-tu  (en grec agapas me da agapào) plus que tous? », Pierre répond, mais en éludant les termes précis de Jésus : en fait, Jésus utilise un verbe rare, celui de l’agape, le verbe sublime de l’amour absolu, de l’amour d’oblation. Par contre, Pierre répond avec un verbe humble, quotidien, celui de l’amitié et de l’affection (en grec filèo) : je t’aime bien (filo se). Il ne compare pas avec les autres.

 

- Voici la 2ème question : Simon, fils de Jean, m’aimes-tu? (agapàs me)? Jésus comprend la difficulté de Pierre et en demande moins : non plus la comparaison avec les autres mais il conserve la demande de l'amour absolu (agàpe). Pierre répond encore oui, mais il le fait comme s’il  n’avait pas  bien compris, utilisant encore son verbe (filèo), plus sécurisant, humain, le nôtre : je suis ton ami, tu le sais, je t’aime bien. Il n’ose pas parler d’amour, il s’agrippe à l’amitié, à l’affection.

 

- À la 3ème question, Jésus change de verbe, il baisse l’exigence à laquelle Pierre n’arrive pas à répondre. Il se rapproche de son cœur incertain, il en accepte les limites et adopte son verbe : Pierre, m’aimes-tu bien? (fileìs me de fileo)? Il lui demande l’affection, si  c’est trop de demander l’amour ; il lui demande au moins l’amitié, si l’amour fait peur; il demande simplement un peu de bien.

 

Jésus démontre son amour en baissant par trois fois les exigences de l’amour, en adaptant son pas sur le pas plus lent du disciple, comme sur la route vers Emmaüs. Enfin, Jésus accepte que Pierre l’aime comme Pierre pense qu’il est possible pour lui de l’aimer. Comme Il sait que Pierre l’aime réellement et totalement, Jésus lui confie "la primauté de l’amour pour faire paître l’Église ",  il lui met sur ses épaules le pouvoir qui vient de la charité (agàpe).

 

 Pierre, qui a su reconnaître sa propre pauvreté et recevoir l’amour du Christ, pourra servir, faire paître ses frères, pauvres, nécessiteux d’amour et de vérité. Pierre est prêt: Il pourra aider ses frères pauvres, maintenant qu’il a accepté sa pauvreté. Il a mendié l’amour du Seigneur qui l’invite à le suivre, toujours.    

 

Une question se pose pour nous : De quel amour aimons-nous Jésus et, incidemment, nos frères ? L’amour agape qui est l’idéal qu’il nous faut poursuivre ou l’affection (filèo) dont Pierre ne se sent désormais que la capacité depuis son reniement ? Si la liturgie de la nuit de Pâques nous dit à propos du péché d’Adam : « Ô heureuse faute qui nous a valu un tel et si grand rédempteur »,  ne pouvons-nous pas dire à propos de la chute de Pierre : « Ô heureuse faute qui nous a valu un tel et si grand pasteur » ? En raison de sa chute, Pierre sera désormais plus à même de communiquer cette miséricorde dont il a été lui-même bénéficiaire. Lui qui ne se sent capable que d’affection comptera dorénavant sur le Seigneur pour donner l’amour agape que Jésus requiert de lui selon la célèbre phrase d’Augustin d’Hippone : « Donne-moi ce que Tu me demandes et demande-moi ce que Tu me donnes ».

 

Sommes-nous capables, à l’instar de Pierre, de reconnaître les limites de nos capacités humaines d’aimer et de demander au Seigneur de venir lui-même combler le fossé qui existe entre, d’une part,  l’idéal de l’amour que Jésus requiert de ceux qui désirent se mettre à sa suite, et qui n’est pas autre chose que l’amour dont il nous a lui-même aimé, et, d’autre part, notre incapacité radicale à lui rendre amour pour amour que ce soit directement ou par l’entremise des personnes qui croiseront notre route et qui constituent le moyen immédiat mis à notre disposition pour manifester l’amour attendu de nous ?

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