Rois mages

Pourquoi ces trois savants étrangers, riches par surcroît, ont-ils trouvé Dieu qui vient de revêtir la chair sous la forme d’un enfant naissant ? N’avaient-ils pas tout contre eux ? « Je te bénis, Père, Seigneur du ciel et de la terre, d'avoir caché cela aux sages et aux intelligents et de l'avoir révélé aux tout-petits » (Mt 11, 25); « il est plus facile à un chameau de passer par un trou d'aiguille qu'à un riche d'entrer dans le Royaume des Cieux » (Mt 19, 24). Que de pauvres bergers trouvent et adorent l’enfant Jésus est tout-à-fait conforme à l’esprit des Évangiles. Mais, à première vue, il est pour le moins étonnant de voir ces sages riches trouver Jésus et se prosterner devant lui. Qu’ont-ils à nous apprendre ?

D’abord, l’humilité. Comment savons-nous qu’ils étaient humbles ? Ils ne placent pas toute leur confiance dans leur science et leur richesse. L’étoile qui les guidait vient-elle à disparaître qu’ils n’hésitent pas à demander conseil : ils arrivèrent à Jérusalem et demandèrent : « Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? Nous avons vu se lever son étoile et nous sommes venus nous prosterner devant lui. ». À qui ont-ils demandé ? Nous l’ignorons mais ce ne fut pas à Hérode qui fut pris d'inquiétude en apprenant cela. Pourtant n’eut-il pas été naturel pour eux de s’enquérir auprès d’une personne ayant un statut social similaire au leur ? Voulons-nous une autre preuve de leur humilité ? Arrivés à destination, ils se prosternèrent devant Jésus en dépit du fait que ce dernier n’avait sûrement pas les apparences d’un roi en devenir : « sans beauté ni éclat pour attirer nos regards, et sans apparence qui nous eût séduits » (Is 53, 2).

La docilité à l’Esprit de Dieu est leur seconde caractéristique qui attire notre attention. L’étoile devait être visible à tous. Pourtant, alors comme aujourd’hui, il n’y a qu’une minorité de gens qui prêtent attention à la voûte étoilée. Et parmi tous ceux qui ont vu le signe, il n’y en a que trois qui l’ont interprété correctement ou, s’ils étaient plusieurs à avoir compris, à se mettre en marche et à se rendre au terme de leur quête. Cette docilité à l’Esprit se manifeste de nouveau alors qu’ils s’apprêtent à retourner chez eux : avertis en songe de ne pas retourner chez Hérode, ils regagnèrent leur pays par un autre chemin. Certains voient, non sans raison, dans cet autre chemin, le signe que la rencontre de Dieu a changé la vie des mages. La question qui se pose à nous est la suivante : et nous ? Notre foi fait-elle une différence dans notre vie quotidienne ?

Enfin, on ne peut passer sous silence la persévérance de ces chercheurs de Vérité. Nous ne savons des mages qu’ils sont venus d’Orient. Comme Hérode envoya mettre à mort, dans Bethléem et tout son territoire, tous les enfants de moins de deux ans, d'après le temps qu'il s'était fait préciser par les mages (Mt 2, 16), il est permis de penser, compte tenu du délais requis pour les préparatifs du voyage et celui qu’Hérode se rende compte qu’il avait été berné, que le voyage des mages pour parvenir à Jésus ait pu durer entre un an et quelques mois de moins de deux ans. L’étoile vient-elle à disparaître ? Ils n’en continuent pas moins leur recherche ! Tous les croyants, même les plus grands saints, connaissent des périodes où Dieu se fait discret, où tout signe sensible de sa présence semble disparaître, afin d’aviver leur foi et leur amour de Lui (qu’ils Le désirent plus ardemment encore). « Demandez et l'on vous donnera; cherchez et vous trouverez; frappez et l'on vous ouvrira. Car quiconque demande reçoit; qui cherche trouve; et à qui frappe on ouvrira. Quel est d'entre vous l'homme auquel son fils demandera du pain, et qui lui remettra une pierre? Ou encore, s'il lui demande un poisson, lui remettra-t-il un serpent? Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père qui est dans les cieux en donnera-t-il de bonnes à ceux qui l'en prient! » (Mt 7, 7-11). La meilleure chose que nous puissions demander à Dieu est de Le connaître et L’aimer dès à présent, de façon imparfaite, et en plénitude pour l’éternité. Notre Père des cieux ne saurait demeurer insensible à la démarche persévérante de ceux qui Le cherchent et souhaitent L’aimer davantage. C’est la grâce que je nous souhaite à tous.