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Méditations sur les enseignements bibliques pour le quotidien d'aujourd'hui

Perception

 

Perception

 

À cause de la faiblesse de nos sens, nous sommes impuissants à distinguer la vérité.

 

Anaxagore  (500-428)

 

 

Complexe, la vérité est difficile à saisir. Pire encore, se révélerait-elle à nous toute entière qu’immanquablement nous la déformerions notamment en y ajoutant notre interprétation des faits ou par simple défaillance de notre mémoire. Qui n’a pas joué au téléphone indien où les personnes se transmettent une simple phrase dans le secret pour constater dans l’hilarité, à l’arrivée, que le message a beaucoup changé depuis son point de départ ? Ainsi, non seulement la faiblesse de nos sens nous rend-elle difficile l’accès à la vérité mais encore notre incapacité à la transmettre intégralement complique-t-elle davantage l’expansion de la connaissance. Cette vérité est-elle Dieu que les mots manquent pour la décrire, les analogies employées se fondant sur les limites et les imperfections du visible pour illustrer une ressemblance quelconque à l’infini et à la perfection de l’Invisible. L’apôtre Paul ayant vécu une expérience mystique élevée demeure sans voix pour transmettre la vérité à laquelle il a eu le privilège d’accéder alors « qu'il fut ravi jusqu'au paradis et qu'il entendit des paroles ineffables, qu'il n'est pas permis à un homme de redire » (2 Co 12,4).

 

Si nous éprouvons des difficultés à saisir la vérité, de quel droit jugeons nous des situations, de notre prochain et même de Dieu ? L’expérience de Job nous montre à quel point de tels jugements peuvent être erronés. Les amis de Job, ceux qui lui restent malgré la série de malheurs qui se sont abattus sur lui, serait-il plus exact de dire, pourtant bien intentionnés au départ, se mettent à l’accabler de reproches et insinuent que sa descente aux enfers constitue une punition de Dieu, le juste salaire d’actes répréhensibles que Job doit à coup sûr leur cacher. Tout cela n’est que pure spéculation et repose probablement sur la relation qu’eux-mêmes entretiennent avec Dieu à savoir non pas une relation d’amour selon le désir de Dieu mais une relation intéressée où amour et gratuité brillent par leur absence et où ils s’attendent à être récompensés s’ils marchent selon les voies du Seigneur et punis dans le cas contraire. La pureté et la gratuité de la relation d’amour entre Job et Dieu n’en ressort qu’encore plus alors qu’il continue de bénir Dieu dans l’épreuve : « Nu, je suis sorti du sein maternel, nu, j'y retournerai. Yahvé avait donné, Yahvé a repris: que le nom de Yahvé soit béni! »  (Jb 1, 21) et qu’il refuse de maudire Dieu comme l’y incite son épouse reconnaissant à Celui-ci le droit donner comme celui d’enlever sans autre explication : « Job lui répondit: "Tu parles comme une folle. Si nous accueillons le bonheur comme un don de Dieu, comment ne pas accepter de même le malheur!" En toute cette infortune, Job ne pécha point en paroles » (Jb 2, 10).

 

Arriverions-nous malgré tout à discerner la vérité et à voir le mal qu’il ne se révèle pas pour autant opportun d’agir ainsi que Jésus en fait part à ses disciples dans la parabole du bon grain et de l’ivraie (Mt 13, 24-30). Faut-il préciser au départ, pour ceux qui l’ignorent, qu’ivraie et blé sont deux plantes semblables et qu’il est possible de se méprendre. Aussi, le maître refuse-t-il d’acquiescer à la proposition de ses serviteurs de nettoyer le champ de peur qu'en enlevant l'ivraie, ils n’arrachent le blé en même temps, sans compter les dommages qu’ils pourraient causer en piétinant involontairement certains plants de blé. À cela s’ajoute, que contrairement à l’ivraie qui ne peut jamais devenir du blé, l’homme a toujours la possibilité de se convertir et d’être sauvé jusqu’à ce qu’il rende son dernier souffle ainsi que le laissait entendre la parabole des ouvriers de la onzième heure (Mt 20, 1-16) alors que les derniers embauchés ont reçu le même salaire que ceux ayant peiné toute la journée, parabole qui s’est vérifiée sur la croix alors que le Christ a promis le paradis au larron qui a confessé à la fois sa mauvaise conduite et la divinité du Christ : « En vérité, je te le dis, aujourd'hui tu seras avec moi dans le Paradis » (Lc 23, 42). Jean Chrysostome note que l’usage de l’ivraie dans la parabole n’est pas fortuit puisque c'est la méthode du diable de mêler toujours à la vérité l'erreur revêtue des apparences et des couleurs de la vérité, de façon à pouvoir séduire facilement ceux qui se laissent tromper. Aussi le spirituel doit-il se tenir constamment sur ses gardes afin de ne pas confondre vérité et erreur. Enfin, la parabole s’adresse aussi à l’ivraie, si je puis m’exprimer ainsi, puisque si elle peut croître en toute impunité dans le champ de la vie sans qu’elle ne soit menacée de quelque tort en raison de la bonté et de la perspicacité du Maître, elle ne doit pas s’imaginer que son sort différera au terme de son parcours si elle ne profite pas du temps de grâce qui lui est accordé pour se convertir en bon grain : « Laissez-les pousser ensemble jusqu'à la moisson ; et, au temps de la moisson, je dirai aux moissonneurs : Enlevez d'abord l'ivraie, liez-la en bottes pour la brûler ; quant au blé, rentrez-le dans mon grenier. ' » (Mt 13, 30).

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