Méditations sur les enseignements bibliques pour le quotidien d'aujourd'hui
9 Décembre 2010 Pensées
Continuer
Ne t'arrête jamais. On recule toujours dès que quelque chose est sur le point de se produire.
– Peter Brook (1925- )
|
Que de fois nous arrêtons-nous alors que nous touchons au but ? La plupart du temps, ce sera par lassitude et/ou parce que nous n’avons pas conscience d’avoir parcouru la quasi-totalité du chemin requis pour toucher la récompense espérée. D’autres fois, par contre, ce sera la peur consciente ou inconsciente de l’inconnu qui nous retiendra et nous fera bousiller au tout dernier moment une opportunité pourtant remplie de promesses… Si nous ressentons l’envie de nous arrêter en cours de route, nous devrions consulter des personnes de confiance notamment des gens qui ont vécu une situation similaire et qui nous aideront à y voir clair sur là où nous sommes vraiment et sur ce qui reste encore à faire. Les personnes d’expérience pourront également dissiper nos craintes sur l’inconnu qui nous attend en partageant leur expérience personnelle. Nous devons nous montrer particulièrement vigilants lorsque nous pressentons arriver à destination pour éviter qu’un relâchement de notre part vienne tout faire rater ou que notre inconscient nous dicte une conduite contraire à l’objectif poursuivi en réaction à l’inconfort ressenti face à l’incertitude inhérente au changement.
Pensons-nous que la route sera plus facile parce que notre objectif est spirituel et que nous souhaitons nous rapprocher de Dieu ? Rien de moins sûr ainsi qu’en font foi les paroles de Thérèse d’Avila : « Seigneur, si c'est comme cela que tu traites tes amis, je comprends que tu n'en aies pas beaucoup ! » S’il semble à première vue contradictoire d’entendre Jésus, qui prêche pourtant l’amour, dire : « Depuis les jours de Jean le Baptiste jusqu'à présent le Royaume des Cieux souffre violence, et des violents s'en emparent » (Mt 11, 12) c’est que la violence dont il s’agit n’est pas à l’encontre des autres mais de nos propres passions qu’il nous faut combattre avec acharnement, le fil ténu d’un attachement en apparence bénin pouvant nous retenir dans notre élan vers Dieu comme le disait Jean de la Croix. Si Dieu semble nous laisser à nous-mêmes dans ce combat spirituel ou, pire, nous mettre les bâtons dans les roues, ce n’est pas qu’Il nous soit indifférent ou contre nous. Au contraire, il nous éprouve par le feu des épreuves pour que nous en ressortions plus purs comme l’or dans le creuset. D’ailleurs, qui pourrait venir à bout d’un seul de ses penchants mauvais s’Il ne venait au secours de notre faiblesse (Mc 9, 24) et nous assistait de sa grâce ? Songeons-nous à nous arrêter sur la route de l’amélioration continue, de la sainteté ? Persévérons malgré les difficultés, le fil qui nous retient de passer à une autre étape est peut-être sur le point de se rompre ! Ce dernier ne se romprait-il jamais qu’il n’y a pas lieu de désespérer pour autant. Dieu qui voit les choses autrement, nous récompensera-t-il peut-être encore plus dans l’éternité que si nous avions réussi en raison du rude combat que nous aurons livré au mal et qui pourrait se voir reconnaître une plus grande valeur que la victoire elle-même, cela sans avoir à encourir le risque de s’enorgueillir de celle-ci, ce qui aurait pu avoir pour effet d’en annihiler la valeur, la récompense se trouvant alors dans l’autosatisfaction que nous ressentons.
Je vous joins le texte d’une très belle homélie de Guerric d'Igny (v. 1080-1157) sur le sujet et publiée par le site http://www.levangileauquotidien.org/ :
« Quelqu'un lutta avec Jacob jusqu'au lever du jour..., et Jacob lui dit : ' Je ne te lâcherai pas avant que tu m'aies béni ' » (Gn 32,25.27) Pour vous, mes frères, qui avez entrepris d'enlever le ciel d'assaut et qui avez engagé la lutte avec l'ange chargé de garder l'accès de l'arbre de vie (Gn 3,24), pour vous il est absolument nécessaire de lutter avec constance et ténacité..., non seulement jusqu'à la paralysie de votre hanche..., mais jusqu'à la mort de votre être charnel. Toutefois, votre ascèse ne pourra y parvenir que si la puissance divine vous touche et vous en fait la grâce...
Ne te semble-t-il pas lutter avec l'ange ou plutôt avec Dieu lui-même, lorsque, chaque jour, il se met en travers de tes désirs les plus fougueux ?... Tu cries vers lui et il ne t'écoute pas. Tu veux t'approcher de lui, et il te repousse. Tu décides quelque chose, et il fait arriver le contraire. Ainsi, sur presque tous les plans, il te combat d'une main rude. Ô bonté cachée, déguisée en dureté, avec quelle tendresse, Seigneur, tu combats ceux pour qui tu combats ! Tu as beau « le cacher dans ton cœur », « je sais bien que tu aimes ceux qui t'aiment », et que sans limites est « l'abondance de la bonté que tu tiens en réserve pour ceux qui te craignent » (Jb 10,13; Pr 8,17; Ps 30,20).
Alors, frère, ne désespère pas, agis courageusement, toi qui as entrepris de lutter avec Dieu ! À vrai dire, il aime que tu lui fasses violence, il désire que tu l'emportes sur lui. Même quand il est irrité et qu'il étend le bras pour frapper, il cherche, comme il le dit lui-même, un homme semblable à Moïse qui sache lui résister... Jérémie, lui, a bien tenté de lui résister, mais il n'a pas pu retenir sa colère implacable, sa sentence inflexible ; c'est pourquoi il a fondu en larmes en disant : « Tu as été plus fort que moi, et tu l'as emporté » (20,7).